Un peu d'histoire pour avoir une idée du site
Cockerill Sambre Chertal

Le site de Chertal - Histoire et mémoire sidérurgique

Avant l'aciérie

Avant l'installation de l'aciérie, les terres de Chertal ont longtemps eu une vocation agricole. Entre les vergers, les prés et les fermes, la vie y était champêtre.
À la fin des années 1930, ce calme est bouleversé par la construction du Canal Albert puis, dans les années 1950, par la modernisation du réseau autoroutier wallon. Grâce à ces aménagements et à cette proximité avec les réseaux de communication, ces terrains sont désormais fort bien situés pour toute activité économique.
Le Canal Albert, reliant Liège au port d'Anvers en passant par les mines de charbon de Campine, allait notamment permettre un développement européen de la sidérurgie, tant dans l'approvisionnement des matières premières que dans l'exportation des produits finis.

Le choix de Chertal

À la fin des années 1950, l'entreprise Espérance-Longdoz souhaite moderniser et étendre ses installations qui sont à l'étroit dans le tissu urbain de Seraing, de Jemeppe et du quartier du Longdoz à Liège, où elle exploite ses usines : entre les industries et les habitations, il reste très peu de place pour implanter de nouveaux outils et pour développer les projets d'envergure de la société.
Au même moment, sous l'égide de l'Europe, le Gouverneur de la Province de Liège décide de réaliser un vaste projet d'industrialisation des terres agricoles en Basse-Meuse et propose aux patrons d'Espérance-Longdoz de réaliser leurs investissements à Chertal.

La construction des convertisseurs de l'aciérie (1961)

Un chantier titanesque commence dès 1960 pour adapter ces terrains marécageux à leur nouvelle fonction, pour préparer les fondations et pour construire une nouvelle aciérie, un slabbing (gros laminoir qui transforme les lingots en brames) et un train de laminoirs à chaud, capables de produire des bandes de 2,05 mètres, les plus larges de l'époque.
D'importants travaux d'aménagement sont également nécessaires pour relier le site aux réseaux fluvial, ferroviaire et routier, pour l'alimenter en électricité et en eau, et pour y amener le gaz et l'oxygène produits dans les usines d'Espérance-Longdoz à Seraing.

Le raccordement ferroviaire

La première pierre de Chertal est posée en 1961. Un défi de taille à relever est le raccordement aux infrastructures ferroviaires de la SNCB.
Afin d'approvisionner l'aciérie en fonte, il était nécessaire de relier par le rail l'aciérie de Chertal au haut-fourneau 6 de Seraing, distants d'une vingtaine de kilomètres, tout en traversant la Meuse.
Un pont métallique est construit à Wandre sur le chenal de Monsin et 4,1 km de voies ferrées sont ajoutés au réseau existant de la SNCB.
Les chiffres donnent le vertige :
· 5 millions de m³ de remblais
· Terres rehaussées de 5 m
· 10 000 pieux de fondation enfoncés à 10 m de profondeur
· 600 m³ de béton coulés par jour
· 22 500 tonnes de charpentes pour l'aciérie
· 19 000 tonnes pour le laminoir
· Convertisseurs de 14 tonnes
· Colonnes de laminoir de 190 tonnes
· Un oxyduc de 22 km
· 20 mois de construction
· 2 500 à 3 000 hommes en permanence sur le chantier

Les wagons-thermos

Pour transporter la fonte liquide sur une vingtaine de kilomètres en évitant les déperditions de chaleur du métal en fusion, la société Espérance-Longdoz a développé des wagons spéciaux : les wagons-thermos, aussi appelés poches-torpilles.
· Capacité : environ 120 tonnes
· Température : 1350 °C, perte de seulement 5 °C par heure grâce aux briques réfractaires
· Trajet : 22 km, durée 50 minutes, vitesse 40 km/h
· Débit : 300 tonnes/heure, soit 2 400 tonnes/jour
Les wagons traversaient une partie de la Ville de Liège, longeaient des habitations et leur passage était adapté à la dense fréquentation du réseau ferroviaire. Grâce à la vigilance des machinistes, aucun accident majeur n'a été déploré entre 1963 et 2011.

Les convertisseurs et la coulée continue

Une fois arrivée à Chertal, la fonte était directement versée dans les convertisseurs de l'aciérie.
· 1963 : deux convertisseurs LD-AC de 140 tonnes.
· 1985 : trois convertisseurs LD-HC de 210 tonnes, avec injection d'oxygène par le haut et par le fond.
La première coulée de Chertal a eu lieu le 16 mai 1963. L'acier était coulé en lingots, transformés ensuite en brames par le slabbing.
· 1983 : première ligne de coulée continue, supprimant l'étape du slabbing.
· 2001 : deuxième coulée continue, capacité de 3,5 millions de tonnes/an.
De 1963 à 2011, des millions de tonnes de fonte liquide ont traversé la ville entre Seraing et Chertal, tandis que les coils empruntaient le chemin inverse pour rejoindre les lignes à froid.

Déclin et fermeture

Le projet de Chertal était sans doute trop ambitieux et, peu après la construction du site, Espérance-Longdoz commence à manquer de liquidités.
· 1970 : fusion avec Cockerill-Ougrée naissance de COPEL.
· Crises économiques et mondialisation concurrence des sites portuaires intégrés.
· Octobre 2011 : ArcelorMittal annonce la fermeture de la phase à chaud : hauts-fourneaux de Seraing, aciérie, coulée continue et laminoir de Chertal.
La fonte ne coule plus et les wagons-thermos se reposent désormais tristement à Chertal, le long du Canal Albert.

Héritage

Pour la Maison de la Métallurgie et de l'Industrie de Liège, sauver un de ces wagons est une nécessité :
· Témoignage du savoir-faire et de l'ingéniosité déployés à Liège.
· Mémoire des choix stratégiques qui ont marqué définitivement le sort de la sidérurgie liégeoise.

 

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